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MOLIÈRE





Oh ! que m’ordonnes-tu, Muse, pour cette fois,
Je ne puis obéir, frissonnant à ta voix.
Non, ne l’exige pas. Quoi ! moi, qu’inexorable,
J’exécute, en bourreau, cet arrêt implacable,
Et qu’au lieu de jeter un voile sur leurs torts,
J’ose porter la main sur la cendre des morts ?
Outrager un tombeau, mais c’est un sacrilége !
— Enfant, tu te souviens des leçons du collége !
Est-il mort celui-là dont les écrits vivants
Charment tant de lecteurs, adorateurs fervents ?
Vit-il pas dans son œuvre, hélas ! impérissable ?
— Un si rare génie ? — Il en est plus coupable !
— Mais à son piédestal, ingrat, porter ce coup.
Moi parfois son disciple et qui lui dois beaucoup ?
— Ne dois-tu rien à Dieu ? Vois-tu pas qu’il outrage,
Ce Molière, à plaisir l’honneur du mariage ?
Le foyer domestique est par lui diffamé ?
— Boileau, sage et prudent, pourtant l’a peu blâmé
Et de tous ses Dandins ne lui fît pas un crime.
— Notre illustre Boileau, que j’aime et que j’estime,
Le poète entre tous grave, honnête, sensé,
L’a, je le sais aussi, largement encensé.
Mais l’Horace français, tolérant casuiste,