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grands problèmes de la société politique et religieuse, et des lois mystérieuses qui régissent le monde visible, sur lequel l’autre (l’invisible) réagit. Bon nombre de passages sont assurément des plus belles choses dont puisse se glorifier notre littérature par la hauteur et la force de la pensée mise en relief par l’énergique simplicité de l’expression. Il suffit de rappeler ce terrible et magnifique portrait du bourreau tant de fois cité, ou cette foudroyante philippique contre Voltaire, cri passionné que l’emportement d’une sainte colère arrache à la conscience révoltée de l’honnête homme, du père de famille et du chrétien. Dirai-je les pages si touchantes sur la Jeune fille livrée au cancer, avec lesquelles font contraste les éloquentes dissertations sur les sauvages ou les mâles réflexions relatives à la guerre. À part peut-être le chapitre sur Locke un peu bien long, on ne peut se lasser de lire et relire cet ouvrage, testament sublime du génie qu’hélas ! il ne fut pas donné à l’auteur de terminer. La mort frappa M. de Maistre quand il touchait à la fin de sa glorieuse tâche et le surprit la plume à la main au moment où il abordait la question si intéressante, comme il écrivait lui-même, et si importante du protestantisme. On eut dit qu’à cette heure solennelle l’intelligence de M. de Maistre, accoutumée à planer dans les hauteurs, s’élevait encore.

Les lettres sur l’Inquisition, sur l’Église Gallicane, se recommandent par l’étude patiente des faits comme par la forte dialectique et la fermeté du style plus plein de choses que de mots. On peut différer d’opinion avec l’auteur, parfois absolu et systématique, mais la toute puissance de son talent ne saurait faire doute pour la