Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce fut là, pendant les deux années que Bailly resta en fonctions, sa continuelle et pénible préoccupation, celle de veiller à l’approvisionnement d’une population de 800,000 âmes que le besoin pouvait pousser aux derniers excès alors surtout que l’ignorance, la prévention portaient si facilement la multitude à croire qu’il y avait calcul, dessein prémédité de l’affamer. Mais quoi ! ce n’était pas seulement prévention résultant de l’ignorance ; car cette détestable calomnie, Marat, l’ennemi acharné de Bailly, ne se lassait pas de la répéter dans sa feuille immonde. Chaque matin aussi, sur tous les tons, l’infâme répétait : Que Bailly rende ses comptes ! alors que la probité du maire de Paris devait être à l’abri de tout soupçon. Dans l’Assemblée nationale même, ces odieuses provocations trouvaient des échos et du haut de la tribune (le 15 juillet 1789) Mirabeau laissait tomber ces paroles qu’Arago qualifie si justement d’incendiaires :

« Henri IV faisait entrer des vivres dans Paris assiégé et rebelle, et des ministres pervers interceptent maintenant les convois destinés pour Paris affamé et soumis. »

Néanmoins ce ne fut qu’après la fuite du roi, à Varennes, que la popularité de Bailly parut sérieusement atteinte. On l’accusait, ainsi que Lafayette, de complicité tout au moins indirecte dans le départ. De là, dans Paris, travaillé par les meneurs, une effervescence croissante, de violentes et continuelles agitations qui aboutirent à l’émeute du 17 juillet 1791, au Champ de Mars où une foule immense s’était donné rendez-vous devant l’autel de la Patrie, pour signer la pétition récla-