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Jean d’Acre, lorsque le fléau exerçait de tels ravages dans l’armée de Syrie qu’on voyait défaillir les plus intrépides courages, comprenant qu’un grand exemple était nécessaire pour rendre un peu de calme et de confiance aux soldats que démoralisait la terreur, pour les faire douter au moins du caractère contagieux de la maladie, au milieu de l’hôpital, M. Des Genettes trempa une lancette dans le pus d’un bubon et se fit deux piqûres dans l’aine et près de l’aisselle, expérience incomplète a-t-il dit plus tard, et qui fait seulement voir que les conditions nécessaires pour que la contagion ait lieu ne sont pas déterminées. »

Un autre jour, à la suite d’une conversation qu’il avait eue avec Berthollet soutenant que les miasmes pestilentiels se transmettent surtout par la salive, il se rend avec son ami dans la salle des malades. Un de ces derniers, moribonds déjà, voyant approcher de son lit le médecin, se soulève par un suprême effort et lui tend son verre dans lequel restait une partie de la potion ordonnée et demande au docteur de la partager avec lui.

« Donnez ! » dit Des Genettes qui prend le verre des mains du pestiféré et le vide sans sourciller : « Action, dit le docteur Pariset, qui donna une lueur d’espoir au mourant, mais qui fit pâlir et reculer d’horreur tous les assistants : seconde inoculation, plus redoutable que la première, de laquelle Des Genettes semblait lui-même tenir peu de compte[1]. »

Mais revenons à l’ordre chronologique et à la biographie. Des Genettes (Réné-Nicolas Dufriche, baron) naquit à Alençon en 1762. Sa famille (les Dufriche et les

  1. Pariset. — Éloge de Des Genettes.