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Providence. Quoique nullement impie au fond, tout absorbé par la passion littéraire et cédant aussi à d’autres moins louables entraînements, il avait vécu, chose rare pour l’époque, trop étranger à la pratique religieuse, au point même d’avoir presque oublié les premiers enseignements du christianisme, témoin cette parole adressée par lui au P. Pouget venu avec un ami pour lui rendre visite. « Après les politesses d’usage, dit un biographe, l’ecclésiastique fit tomber insensiblement la conversation sur la religion et sur les preuves qu’on en tire tant de la raison que des Livres Saints. Sans se douter du but de ces discours :

« Je me suis mis, lui dit La Fontaine avec sa naïveté ordinaire, depuis quelque temps à lire le Nouveau-Testament : je vous assure que c’est un fort bon livre, oui, vraiment, c’est un bon livre. Mais il y a un article sur lequel je ne me suis pas rendu ; c’est l’éternité des peines ; je ne comprends pas comment cette éternité peut s’accorder avec la bonté de Dieu. »

« Le P. Pouget satisfit à cette objection par les meilleures raisons qu’il put trouver dans ce moment ; et La Fontaine, après plusieurs répliques fut si content de l’entendre qu’il le pria de revenir. Le P. Pouget ne demandait pas mieux » car il n’était venu que pour cela. Après une suite d’entretiens prolongés avec le jeune et savant ecclésiastique, La Fontaine, pleinement éclairé, voulut faire une confession générale en se résignant aux sacrifices que lui imposait son directeur et de la nécessité desquels il n’avait pas été facile d’abord de le convaincre : un désaveu public de ses contes, puis la promesse de ne pas donner aux comédiens une pièce com-