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Molière trouva que c’était passer les bornes ; aussi, dit-il, en à parte à Descoteaux :

« Nos beaux-esprits ont beau se trémousser, ils n’effacent pas le bonhomme. »

À propos d’à parte, voici une autre curieuse anecdote et parfaitement authentique : « Dans un repas qu’il fit avec Molière et Despréaux, dit Montenault, où l’on disputait sur le genre dramatique, il se mit à condamner les à parte.

« Rien, disait-il, n’est plus contraire au bon sens. Quoi ! le parterre entendra ce qu’un acteur n’entend pas, quoiqu’il soit à côté de celui qui parle ? »

« Comme il s’échauffait en soutenant son sentiment de façon qu’il n’était pas possible de l’interrompre et lui faire entendre un mot : « Il faut, disait Despréaux, à haute voix tandis qu’il parlait, il faut que La Fontaine soit un grand coquin, un grand maraud ! » et répétait continuellement les mêmes paroles sans que La Fontaine cessât de disserter. Enfin l’on éclata de rire ; sur quoi revenant à lui comme d’un rêve interrompu : « De quoi riez-vous donc ? » demanda-t-il. — Comment ! lui répondit « Despréaux, je m’épuise à vous injurier fort haut, et vous ne m’entendez point quoique je sois si près de vous que je vous touche : et vous êtes surpris qu’un acteur sur le théâtre n’entende point un à parte qu’un autre acteur dit auprès de lui ? … »

Ces distractions parfois si plaisantes de même que la profonde méditation dans laquelle d’autres fois il était absorbé au point de paraître comme insensible n’empêchaient point qu’il fût causeur des plus charmants, con-