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partent : c’était un choc, c’était un combat entre une forte reconnaissance française et trois escadrons autrichiens. Sans armes, n’ayant qu’une cravache à la main, Desaix se jette au milieu de la mêlée : il est renversé et fait prisonnier. On le dégage, il recommence à combattre, et rentre dans Landau avec la reconnaissance victorieuse et un prisonnier qu’il a fait lui-même[1]. »

Devant Strasbourg, ses troupes, attaquées par un ennemi très-supérieur en nombre, plient et se retirent. Il se jette au-devant d’elles.

— Général, lui crie-t-on, n’avez-vous pas ordonné la retraite ?

— Oui, répond Desaix, mais c’est celle de l’ennemi.

À ce cri d’une âme courageuse, et qui ménageait avec tant de délicatesse la fierté des soldats, ceux-ci, comme dans une manœuvre d’exercice, se retournent, fondent sur un ennemi qui se croyait déjà vainqueur et ne lui laissent pas même la ressource de la fuite.

« Je battrai l’ennemi tant que je serai aimé de mes soldats, » disait Desaix, et il en était adoré.

« Au passage du Rhin, en l’an V, l’un des premiers il touche la rive droite du fleuve ; et au moment où, avec un petit nombre de soldats, il arrête, désarme ou renverse les bataillons autrichiens, un coup de fusil, qu’il a vu ajuster sur lui, lui perce la cuisse et le blesse grièvement. Cette générosité, qui ne l’abandonne jamais et qui semble le dominer davantage au milieu des scènes de carnage, lui donne la force d’aller jusqu’au

  1. Éloge de Kléber et Desaix, par Garat (1er vendémiaire, an IX). — 1800. In-8°.