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et la tendresse paternelle aveugla Corneille, comme elle fait de beaucoup de parents, sur les défauts de ses enfants tard venus, pour lesquels sa faiblesse fut d’autant plus grande qu’ils semblaient aux autres mal conformés, boîteux ou rachitiques. Peut-être aussi Corneille céda-t-il à l’habitude aussi bien qu’à ces fâcheuses nécessités qui attristèrent sa vieillesse mais qu’il eût pu s’éviter avec un peu plus de prévoyance. « Rien n’était égal, dit Fontenelle, à son incapacité pour les affaires que son aversion ; les plus légères lui causaient de l’effroi et de la terreur. Quoique son talent lui eût beaucoup rapporté, il n’en était guère plus riche. Ce n’est pas qu’il eût été fâché de l’être ; mais il eût fallu le devenir par une habileté qu’il n’avait pas et par des soins qu’il ne pouvait prendre. »

C’est à ce « manque de soins », regrettable et non point au goût du luxe et des folles dépenses qu’il faut attribuer la gêne dont le poète souffrit à diverses époques ; car d’ailleurs « Corneille conserva des goûts simples parce que ses mœurs étaient pures », dit très bien Victorin Fabre. Il put avoir des défauts, mais on ne lui connut pas de vices. Il sut goûter les douceurs de la vie domestique et trouver son bonheur dans ses devoirs. Son frère et lui couraient la même carrière ; ils avaient épousé deux sœurs, et sans arrangement de fortune, sans partage de succession, les deux ménages confondus ne firent qu’une même famille tant que vécut l’aîné des deux frères. »

Cela est assurément à la louange des deux frères comme aussi de leurs femmes ; mais sans doute la meilleure part de l’éloge doit revenir à l’illustre poète. Dan-