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mieux influencé, entraîné du côté où il penchait par Colbert, dans l’affaire du duc de Créquy à Rome, comment la comprendre, et surtout, dit très-bien St-Victor, comment l’excuser ? « En fut-il jamais de plus dure, de plus injuste, de plus cruelle même et d’un plus dangereux exemple ? Quel triomphe pour le roi de France de se montrer plus puissant que le pape comme prince temporel, et sous ce rapport, de ne mettre aucune différence entre lui et le dey d’Alger ou la république de Hollande ; de refuser toutes les satisfactions convenables à sa dignité que celui-ci s’empressait de lui offrir à l’occasion d’un malheureux évènement que les hauteurs de son ambassadeur avaient provoqué et dont il lui avait plu de faire une insulte[1] ; de violer en lui tous les droits de la souveraineté en le citant devant une de ses cours de justice et en séquestrant une de ses provinces ; de le contraindre, par un tel abus de la force, à s’humilier devant lui par une ambassade extraordinaire dont l’effet immanquable était d’affaiblir, au profit de son orgueil, la vénération que ses peuples devaient au Père commun des fidèles et dont son devoir à lui-même était de leur donner le premier l’exemple ? Il le remporta ce déplorable triomphe… »

« Louvois avait fait de Louis XIV le vainqueur et l’arbitre de l’Europe : Colbert jugea que ce n’était point assez et ne prétendit pas moins qu’à le soustraire entièrement à l’ascendant, de jour en jour moins sensible, que l’autorité spirituelle exerçait sur le souve-

  1. Ses laquais avaient chargé, l’épée à la main, une escouade de Corses qui protégeait les exécutions de la justice.