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motifs essentiels et par leurs véritables raisons ? Quand avons-nous cherché la bonne constitution de notre âme ? quand nous sommes-nous donné le loisir de considérer quel devait être notre intérieur, et pourquoi nous étions en ce monde ? Nos amis, nos prétentions, nos charges et nos emplois, nos divers intérêts que nous n’avons jamais entendus, nous ont toujours entraînés ; et jamais nous ne sommes poussés que par des considérations étrangères. Ainsi se passe la vie, parmi une infinité de vains projets et de folles imaginations ; si bien que les plus sages, après que cette première ardeur qui donne l’agrément aux choses du monde est un peu tempérée par le temps, s’étonnent le plus souvent de s’être si fort travaillés pour rien[1] ».

A-t-on mieux que Bossuet déchiffré l’insatiable convoitise qui, de même qu’une autre non moins terrible passion, jamais ne dit : c’est assez ! asser ! asser !

« Premièrement, chrétiens, c’est une fausse imagination des âmes simples et ignorantes, qui n’ont pas expérimenté la fortune, que la possession des biens de la terre rend l’âme plus libre et plus dégagée. Par exemple on se persuade que l’avarice serait tout à fait éteinte, que l’on n’aurait plus d’attache aux richesses, si l’on en avait ce qu’il faut. Ah ! c’est alors, disons-nous, que le cœur qui se resserre dans l’inquiétude du besoin, reprendra sa liberté tout entière dans la commodité et dans l’aisance. Confessons la vérité devant Dieu : tous les jours, nous nous flattons de cette pensée ; mais certes nous nous abusons, notre erreur est extrême.

  1. Sermon sur la Loi de Dieu.