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ou un volume de poésies. Il vous faut toujours bien quelques semaines. »

Or, moins de huit jours après, je rapportais les quatre volumes.

« Quoi ! déjà ! me dit l’ami presque avec l’accent du reproche. Est-il donc possible que vous ayez pris si peu goût à cette lecture et qu’elle vous ait lassé si vite ?

— Bien au contraire, elle m’a surpris, ravi, enthousiasmé jusqu’à l’extase, jusqu’au délire. Bossuet est aussi pour moi maintenant le sublime orateur, l’incomparable écrivain ; et si j’ai quelque regret, c’est qu’on ne songe pas à lui élever dans sa ville épiscopale une statue, je serais des premiers à souscrire. Ah ! mon ami, que je vous remercie de me l’avoir fait connaître ! Quel homme ! quel homme ! qui dit tout ce qu’il veut dire, en effet, et comme il le veut. Ô la merveilleuse, l’inimitable éloquence, inimitable parce qu’elle joint à la solidité du fond la beauté de la forme, d’une forme d’autant plus admirable qu’elle dédaigne toute recherche, et qu’elle fait tout naturellement à la pensée un vêtement splendide ! Quelle profondeur et quelle élévation ! Quelle puissance et quelle majesté ! Quelle ample et royale faconde ! Ce style, plus plein encore de choses que de mots, s’épanche à larges ondes, en flots impétueux, comme le fleuve des Cordillières jaillit de la source intarissable. Merci mille fois, merci de m’avoir conduit par la main et un peu malgré moi à la découverte de trésors que je m’obstinais à méconnaître et dans lesquels je me promets de puiser hardiment sans crainte de jamais les tarir. Si je vous rapporte ces volumes, c’est qu’après lecture des deux premiers, j’ai couru chez le libraire pour me pro-