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Et cette somme fut remise le lendemain à Berthollet, qui, tout occupé de ses expériences et confiné pour ainsi dire dans son laboratoire, n’en sortait que bien rarement pour se rendre aux Tuileries, et ne se montra pas plus courtisan. On ne pourrait assurément que l’en louer si toujours il s’en fût tenu là. Mais on regrette d’avoir à ajouter qu’en 1814, cédant, paraît-il, aux conseils de son ami Laplace, il vota la déchéance de Napoléon en se ralliant au gouvernement provisoire. Lui convenait-il d’agir ainsi après les témoignages d’affectueuse estime dont l’Empereur, qui l’appelait son chimiste et son ami, n’avait pas été pour lui avare ? Berthollet se devait à lui-même de rester à l’écart, et de n’accepter rien des gouvernements qui devaient succéder à l’Empire. Mais, pour être juste, il ne faut pas dissimuler que son caractère, sinon son intelligence, avait reçu un grand ébranlement par suite de la terrible catastrophe qui, en 1812, lui enleva son fils unique, dont la mort fut des plus tragiques. « Dès lors, toute gaîté fut perdue pour lui. Pendant le peu d’années qu’il survécut, son air morne et silencieux contrastait péniblement avec ses habitudes antérieures ; on ne le vit plus sourire ; quelquefois, une larme s’échappait malgré lui… »

Cuvier ajoute :

« Sa dernière maladie a été de celles qui surprennent et désespèrent la médecine : un ulcère charbonneux, venu à la suite d’une fièvre légère, l’a dévoré lentement pendant plusieurs mois, mais sans lui arracher un mouvement d’impatience. Cette mort, qui arrivait à lui par le chemin de la douleur, dont, comme médecin, il