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LE COMBAT FRATRICIDE

la mort, lorsqu’il aperçut que Bohor regardait la bataille, assis sur son séant.

— À l’aide, Bohor ! cria-t-il. Jetez-moi hors de ce péril où je me suis aventuré pour vous, qui êtes plus preux que je ne suis !

À grand’peine Bohor se remit debout, se signa et rajusta son heaume, gémissant de pitié à voir le cadavre du prêtre qu’il venait de découvrir. Mais Lionel à cet instant, d’un dernier coup d’épée, jetait mort Calogrenant, et aussitôt courant à son frère qui encore une fois le priait humblement de pardonner, il lui assena un tel revers sur le heaume qu’il lui fit plier les genoux. En pleurant, Bohor tira alors son épée, et il allait frapper pour se défendre, lorsqu’un brandon de feu tomba du ciel entre les deux frères, fulgurant comme la foudre et si flamboyant que leurs écus en furent brûlés et qu’ils churent tous deux sur le sol, où ils demeurèrent pâmés durant un aussi long temps qu’il en faut pour faire une lieue à pied.

Quand il reprit son haleine, Bohor reconnut que Lionel n’avait point de mal et remercia Dieu. Puis il s’approcha de son frère, qui était encore tout étourdi :

— Vous avez mal agi, lui dit-il, en tuant ce prêtre et ce chevalier qui était notre compagnon à la Table ronde et le cousin germain de monseigneur Yvain, fils du roi Urien. En nom Dieu, veillez que leurs corps soient mis