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LA TENTATION DE BOHOR

tant vous semblez ribaude. Aimassiez-vous un chevalier plus que tout, vous ne devriez pas lui dire de semblables paroles, ni à plus forte raison le requérir ainsi la première ! D’ailleurs je ne puis vous croire si folle : vous voulez sans doute m’éprouver ?

— Ha, Bohor, si je ne vous aimais pas plus que jamais femme n’aima, vous ferais-je une telle requête ? Je vous prie de me secourir comme je vous l’ai demandé. Si vous y manquez, je vous tiendrai pour failli et vaincu.

— Je me tiendrais pour vaincu bien davantage, dit Bohor, si je faisais ce que vous voulez !

— Remettez-vous donc au lit, sire chevalier ; je ne voudrais pas faire mon ami d’un honni, d’un recréant.

Bohor s’étendit entre les draps : aussitôt la félonne s’élança à ses côtés, et, le tirant par sa chemise, elle feignait d’être bien désireuse de l’embrasser. Mais lui, il la prit et la posa à terre où il la maintint quelque temps si rudement qu’elle ne pouvait bouger. Alors elle se mit à se plaindre, disant qu’elle se sentait malade, et à l’implorer.

— Pour Dieu, accordez-moi ce que je vais vous demander ! Ce ne sera pas contre votre honneur ! Mais il faut que je vous le dise à l’oreille.

Bohor se baisse : elle prend son temps et le baise sur la bouche. Irrité, il saute sur son épée,