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PERCEVAL EMPORTÉ PAR LE DIABLE

quoi n’était ni pont ni planche, il eut si grand peur qu’il leva la main et se signa. Aussitôt l’Ennemi, chargé du poids de la Croix qui était trop lourd pour lui, poussa un hurlement épouvantable et jeta son cavalier à terre, puis il sauta dans le lac qui brasilla et d’où jaillirent flammes et étincelles : tel un bûcher ardent où tombe une pierre. Par quoi Perceval le Gallois comprit que c’était le diable qui l’avait emporté.

Il s’écarta de l’eau le plus qu’il put, afin d’échapper aux assauts des démons, s’agenouilla et, tendant les mains vers le ciel, remercia Dieu de bon cœur. Jusqu’à l’aube, il pria de la sorte ; mais, quand le soleil eut fait son tour au firmament et que le jour clair et beau eut abattu la rosée, il se remit en marche vers l’Orient.


VIII


Il chemina tant qu’à vêpres, il arriva près d’une maison forte où il fut très bien hébergé. Le lendemain, il fut entendre la messe, et comme il sortait de la chapelle, il s’entendit appeler par son nom. Il s’approcha d’une petite fenêtre d’où venait la voix et aperçut une recluse : à peine l’eût-on crue vivante, tant elle était maigre et desséchée.