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ÉCLAIRCISSEMENT

4o Qu’il y a non seulement unité de langue, mais d’esprit et de style. Pour ceci, non ! La qualité littéraire est même tellement inégale dans les différents morceaux, que cela seulement suffirait à nous convaincre que le Lancelot a été rédigé par des auteurs divers : certes les charmantes enfances du héros, par exemple, ne sont pas de la même main machinale qui écrivit l’épisode de la Charrette, et le psychologue (si l’on peut dire) auquel nous devons la Mort d’Artus n’est pas celui qui composa les trois quarts de l’interminable Histoire du Saint Graal (que j’ai fort resserrée en la mettant dans la bouche de Merlin) ! Bien mieux, certaines habitudes de langage, notamment certaines façons qu’ont les personnages de qualifier leurs interlocuteurs ou certaines manières qu’a l’auteur de désigner les compagnons du roi changent par endroits : durant des pages et des pages, la Table ronde notamment est comme oubliée… Mais où l’on croit vraiment rêver, c’est quand on voit M. Lot admettre qu’il y a unité d’esprit entre le mystique récit de la Quête du Graal et la Mort d’Artus ou même certaines parties du Lancelot proprement dit : il est difficile d’imaginer des inspirations plus opposées, l’une tout ecclésiastique et mystique, l’autre tout mondaine. Cela n’est plus discutable depuis que M. Pauphilet a publié son ouvrage. Mais il était clair que l’auteur qui a conçu les personnages de Lancelot ou de la Mort d’Artus n’est pas le même qui les a conçus dans