Page:Boulenger - Romans de la table ronde IV, 1923.djvu/217

Cette page a été validée par deux contributeurs.
214
LA MORT D’ARTUS

de Mordret piqua des deux et s’enfuit vers la forêt comme fait le cerf devant les chiens ; et ainsi la longue chasse commença.

Sachez qu’ils galopèrent tout le reste du jour, l’un appelant et menaçant, l’autre brochant si rudement que le sang coulait des flancs de son destrier, et tant qu’ils arrivèrent au cœur de la forêt. Enfin, le cheval du fuyard broncha et tomba, et le fils de Mordret se mit à genoux criant merci. Mais Lancelot, au passage, d’un seul coup, lui fit voler la tête. Après quoi, sans donner au corps un seul regard, il se mit en devoir de rejoindre ses gens.

Mais il perdit bientôt son chemin et, tandis qu’il croyait se rapprocher de Winchester, il s’en éloignait toujours davantage. Après avoir marché toute la nuit, il se vit, au matin, en face d’une montagne déserte et rocailleuse, et, gravissant un sentier, il parvint à un pauvre ermitage au pied d’une chapelle petite et ancienne. Deux prud’hommes en robes blanches sortirent pour lui faire accueil, dont l’un, l’ayant avisé, courut à lui les bras tendus et l’accola tendrement : c’était l’évêque de Rochester, qui avait jadis fait la paix de la reine Guenièvre et du roi Artus.

— Beau sire, lui dit Lancelot, depuis quand êtes-vous ici ? J’ai grande joie de vous avoir retrouvé !

L’évêque conta qu’après la douloureuse jour-