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COMBAT DU PÈRE ET DU FILS

sénéchal ; puis, voyant que Mordret approchait à grand bruit de ses cors, tambours et buccines, il fit le signe de la croix, prit son écu et sa lance, et commanda aux siens d’avancer.


XXXVIII


Les deux échelles s’entre-choquèrent à si grand fracas que vous eussiez cru ouïr toute la terre crouler. Le roi s’adressa à Mordret dès qu’il le vit et l’autre ne le refusa pas ; même, il frappa le premier et perça l’écu. Mais le haubert était bon et le roi si solide qu’il ne fut pas ébranlé : au contraire, il heurta le traître d’une telle force qu’il culbuta ensemble l’homme et le cheval ; pourtant ses gens ne purent empêcher que Mordret fût remonté par les siens.

Les lances brisées, les épées brillèrent, et bientôt vous eussiez vu les chevaliers verser comme épis mûrs, en sorte qu’il n’en restait pas plus de quarante vers l’heure de none. Tous les compagnons de la Table ronde étaient occis, hormis le roi Artus, Lucan le bouteiller, Keu le sénéchal, Giflet fils de Do et le roi Ydier, et tous ceux-là avaient quelque plaie grande ou petite ; le roi Ydier surtout était si fort navré qu’il pouvait à peine se tenir en