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LA MORT D’ARTUS

si je ne défendais ma terre contre un traître. Par l’âme de mon père Uter Pendragon, je jure que je ne reculerai pas !

À ces mots, messire Gauvain s’éloignait en menant le plus grand deuil du monde.

Et, peu après, le roi sommeillant toujours crut voir une très belle dame qui le prenait par les flancs et l’asseyait sur un siège au sommet d’une roue immense.

— Artus, lui disait la dame, sache que tu es présentement sur la roue de Fortune. Que vois-tu ?

— Dame, il me semble que je découvre le monde entier.

— Tu le vois. Et tu as été l’un des plus puissants de ce monde. Mais il n’est nul, pour haut placé qu’il soit, qui ne doive un jour tomber.

Là-dessus, la belle dame faisait tourner sa roue et choir le roi si traîtreusement qu’il lui semblait être tout brisé.

Au matin, quand il se fut éveillé, il fit le signe de la croix sur son visage et s’écria :

— Beau Père Jésus-Christ qui avez permis que j’eusse tant d’honneurs en ce siècle, ne souffrez pas, doux Sire, que je perde cette bataille, mais donnez-moi la victoire sur mes parjures et déloyaux ennemis !

Puis il alla ouïr la messe et se confesser à un archevêque de tous ses péchés. Après quoi il se mit en marche avec ses gens.