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LA MORT D’ARTUS

son écu qui lui avait sauté du cou, fit resplendir sa bonne épée Escalibor, dont il lui assena un tel coup sur le chef que le heaume en fut bossué. Mais sachez que le choc remit Lancelot dans son droit sens : il riposta sans s’étonner et les lames claires et tranchantes commencèrent de voler plus vite que le vent, allant, venant, montant, descendant. Ainsi, durant longtemps, l’acier mordit l’acier : les écus tombèrent par pièces, les heaumes perdirent leurs pierreries qui étaient de grande vertu, les mailles des hauberts sautèrent et souvent les épées touchèrent la chair nue, faisant ruisseler le sang : de sorte qu’à tierce, si les deux champions eussent été d’aussi grande force qu’au début, ils ne fussent pas demeurés longtemps en vie, tant leurs armures étaient dépecées ; mais ils étaient las au point que leurs épées leur tournaient dans la main quand ils se frappaient. Alors messire Gauvain, le premier, recula et s’appuya sur les restes de son écu pour reprendre haleine. Lancelot l’imita. Ce que voyant, Lionel dit tout bas à Hector :

— Beau cousin, voici que j’ai peur et doutance pour Lancelot ! Car c’est la première fois que je le vois se reposer durant une bataille.

— Sire, répondit Hector, c’est pour l’amour de monseigneur Gauvain qu’il le fait ; je sais bien qu’il n’en a pas besoin !

Cependant, les deux chevaliers demeuraient