Page:Boulenger - Romans de la table ronde IV, 1923.djvu/170

Cette page a été validée par deux contributeurs.
167
HAINE DE GAUVAIN

Et sachez que, si je l’aimais de fol amour comme certains déloyaux vous l’ont fait entendre, je ne vous la rendrais point, car ce château est si fort qu’il ne redoute rien, et nous y avons des vivres pour deux ans.

— De ce que vous faites, je vous sais gré, répondit le roi tout pensif.

Mais messire Gauvain avança d’un pas.

— Lancelot, le roi vous sait gré de ce que vous avez fait pour lui. Mais il vous requiert de vider la terre de Logres et de n’y plus rentrer de son vivant.

— Sire, est-ce là votre commandement ?

— Allez-vous-en dans votre terre, Lancelot : quand vous avez occis Agravain, Guerrehès et Gaheriet, qui étaient mes charnels amis, vous m’avez fait payer vos services à trop haut prix.

— Et quand je serai outre mer, sire, que me faudra-t-il attendre de vous : paix ou guerre ?

— Assurez-vous, dit encore messire Gauvain, que le roi vous fera la guerre, et de tout son pouvoir, jusqu’à temps que mon frère Gaheriet soit vengé par votre mort. Et sachez que je gagerais le monde que vous perdrez sous peu la tête et la vie !

— Messire Gauvain, s’écria Hector, laissez là les menaces : Lancelot du Lac ne vous craint guère ! Si vous mettez les pieds dans la Petite Bretagne, vous serez plus en danger que lui de perdre la tête. Prétendez-vous que vos frères