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BATAILLE DE LA JOYEUSE GARDE

tentes voisines furent également renversées ; c’était Hector qui faisait ce dégât, espérant de surprendre le roi. Mais messire Gauvain lui vint à l’encontre par le travers : il le heurta en plein heaume, et si rudement que l’autre dut embrasser le cou de son destrier pour ne pas tomber, puis s’incliner jusqu’à l’arçon quand messire Gauvain l’eut à nouveau frappé ; et peut-être eût-il péri, si Lionel, qui aimait son cousin de grand amour, n’eût couru sus au neveu du roi ; il lui assena un coup très pesant : son épée entra dans le heaume de deux doigts, et messire Gauvain, tout étourdi, fut emporté par son cheval.

Merveilleuse fut la bataille devant la tente du roi Artus : vous eussiez pu voir ceux de Logres trébucher comme des moutons à l’abattoir ! Pourtant les gens de Lionel et d’Hector, peu nombreux et qui s’étaient trop hardiment jetés au milieu du camp, eussent été détruits, si Lancelot ne fût sorti du château avec les siens. Bientôt il y eut tant d’hommes occis de part et d’autre que le cœur le plus dur s’en fût ému de pitié : la terre était rouge de sang. Et Bellinor fut tué par Lionel et Vadahan le noir par Hector. Mais celui qui fit le plus d’armes, ce jour-là, ce fut messire Gauvain : il était si dolent de la mort de ses frères, qu’il occit trente chevaliers de sa main. Jusqu’au soir son épée vola plus vite que le faucon sur sa proie et devant lui les rangs