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PARLEMENT

hommes étaient venus, mais, à voir le roi Artus morne et pensif comme il était, chacun se tenait coi, si bien qu’on eût pu croire que le palais était vide.

— Quand un homme a perdu sa terre par force et trahison, dit enfin le roi, il peut souvent la recouvrer ; mais la perte d’un ami charnel est sans recours. Beaux seigneurs, le dommage qui m’est advenu ne peut être réparé en aucune manière, et je ne le dois pas à la justice de Notre Seigneur, mais au grand orgueil de celui que j’avais élevé aussi haut que s’il eût été de mon sang. Vous qui êtes mes hommes et qui tenez vos terres de moi, conseillez-moi quelque moyen de venger ma honte.

Les barons se regardèrent, s’encourageant l’un l’autre à parler. Enfin le roi Yon se leva.

— Sire, notre honneur aussi veut que votre honte soit vengée. Mais qui regarderait au bien du royaume, je ne crois pas qu’il ferait la guerre au lignage du roi Ban de Benoïc et du roi Bohor de Gannes, tant Lancelot et les siens sont puissants à cette heure par leurs terres et leurs hommes. C’est pourquoi je vous prie au nom de Dieu, sire roi, de ne point les attaquer si vous n’êtes tout à fait sûr de les vaincre, ce qui sera très difficile.

Il se fit des rumeurs : beaucoup blâmaient le roi Yon et disaient qu’il avait parlé par couardise.