Page:Boulenger - Romans de la table ronde IV, 1923.djvu/137

Cette page a été validée par deux contributeurs.
134
LA MORT D’ARTUS

dérivait au fil du courant, couverte d’un grand et riche drap de soie dont les pans traînaient dans l’eau. Elle vint d’elle-même s’arrêter au pied de la tour ; alors le roi appela son neveu et tous deux descendirent pour la voir.

— Par ma foi, dit messire Gauvain, les aventures recommencent !

Il sauta dans la nacelle, souleva le drap et découvrit un lit sur lequel gisait le corps d’une demoiselle jeune et d’une grande beauté.

— Sire, s’écria-t-il, voici la pucelle que Lancelot aimait d’amour !

Ce disant, il tirait une lettre de l’aumônière qui pendait à la ceinture de la morte. Le roi remonta dans la salle pour se la faire lire : grâce à quoi la reine, ses dames, les prud’hommes qui étaient là, tout le monde l’entendit.


À tous les chevaliers de la Table ronde, salut ! Je, Passerose, la demoiselle d’Escalot, vous fais assavoir que je mourus d’amour, et, si vous demandez pour qui, je vous dirai que c’est pour le plus vaillant, mais aussi le plus cruel chevalier du monde, qui a nom Lancelot du Lac, car vainement je l’ai prié à pleurs et sanglots d’avoir merci de moi.


— Ha, demoiselle, fit seulement le roi, vous pouvez bien dire qu’il était cruel, celui pour qui vous expirâtes !

Et il commanda qu’on enterrât la pucelle à