IX
En revenant de Tannebourg où il était allé visiter le duc de Cambenic, il s’égara avec ses chevaliers dans la foret Perdue. La nuit tombait : on commençait de dresser les tentes et pavillons, lorsqu’on entendit, au loin, sonner du cor. Sagremor le desréé avait déjà sauté à cheval ; et, au bout de peu de temps, il revint dire qu’un petit château très bien crénelé et clos de bons murs, hauts et épais, se dressait à quelque distance. En effet, le roi et ses gens furent émerveillés de la beauté de la forteresse. Le pont était baissé, la porte grande ouverte ; dans la cour brillaient mille torches et cierges, et il n’y avait pas un mur qui ne fût tendu de soie : jamais aucune église ne fut pareillement encourtinée. La dame du château attendait dans la salle, entourée de ses chevaliers et de ses demoiselles qui étaient vêtus à merveille. Et au moment que le roi entra, tous et toutes crièrent d’une seule voix :
— Sire, soyez le bienvenu céans ! Bénite la route qui vous amena !
Or la dame était Morgane la déloyale, et c’est dans ce manoir qu’elle avait tenu Lancelot en