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PREMIER SOUPÇON DU ROI

— Sire, je n’en demande pas davantage.

Malgré qu’il en eût, le roi songea, cette nuit-là, à ce que lui avait dit Agravain ; et certes il ne s’en tourmenta guère dans son cœur, car il ne croyait pas que ce fût vrai ; pourtant, au matin, quand la reine vint lui déclarer qu’elle irait volontiers avec lui à Winchester parce qu’elle avait ouï dire qu’on y verrait de grandes chevaleries, il ne le voulut point et lui commanda de rester : car ainsi comptait-il vérifier les propos d’Agravain.

Or, dès qu’il connut le départ du roi, Lancelot fut prendre congé de sa dame ; puis il fit tout préparer par son écuyer, et il se mit en route secrètement, à la tombée du jour.


II


Il chevaucha toute la nuit à grande hâte, parce qu’il craignait d’arriver en retard aux joutes, si bien qu’au matin il atteignit au village où le roi Artus avait couché et où il se trouvait encore. Lancelot portait des armes déguisées, mais son écuyer menait en main un très beau destrier, taché comme une pie, blanc comme fleur des prés d’un côté, plus rouge que braise de l’autre. Et le roi, qui était justement