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LE CHEVALIER À LA CHARRETTE

c’est depuis ce temps qu’on l’entend dans les tournois.

Presque toute la nuit, il y eut caroles dans les maisons qui étaient si bien illuminées qu’on eût pensé qu’elles flambaient ; et pourtant, dès l’aube, les hérauts commencèrent de mener grand bruit par les rues et de crier : « Ores, sus, chevaliers, il est jour ! » Lancelot fut entendre la messe et déjeuna de pain et de vin. Déjà les cortèges défilaient bellement par la cité, et, sitôt arrivés sur le terrain, il fallait voir les valets ficher les lances en terre, vider les coffres sur les manteaux, étaler les hauberts et les chausses, préparer les sangles, les sursangles, les lacets à heaumes et le fil à coudre les manches. Il y avait bien là plus de cent, plus de deux cents chevaliers et les lances étaient si nombreuses qu’on pouvait se croire dans un bois. Les demoiselles de la ville étaient aux fenêtres ou sur les murs ; mais pour la reine on avait dressé un échafaud bel et long à merveille : elle s’y assit avec ses dames et ses pucelles ; monseigneur Gauvain qui ne combattait pas était auprès d’elle, causant avec d’autres barons qui ne pouvaient porter les armes, soit qu’ils fussent prisonniers sur parole ou croisés.

— Voyez-vous, cet écu où sont un dragon et une aigle ?

— Par ma foi, c’est Ignauré le désiré, qui est bien amoureux et bien plaisant.