Page:Boulenger - Romans de la table ronde III, 1922.djvu/29

Cette page a été validée par deux contributeurs.
23
LE PEIGNE AUX CHEVEUX D’OR

voulez me protéger, je vous guiderai sans crainte.

— Demoiselle, je vous saurai bien défendre contre un chevalier, voire contre deux, dit Lancelot.

Alors elle fit seller les chevaux et ils allèrent longtemps à grande allure par chemins et sentiers, mais il ne répondait guère à ses propos ; penser lui plaisait, parler lui coûtait : amour le veut ainsi. À tierce, ils arrivèrent au bord d’une fontaine, au milieu d’un pré ; là, sur une grosse pierre, gisait un peigne d’ivoire doré, si beau que depuis le temps d’Isoré, personne, ni sage ni fou, n’en vit le pareil. Qui l’avait oublié là ? Je ne sais ; mais Lancelot s’arrêta, étonné, et sauta de son cheval pour le ramasser. Ah ! quand il le tint dans ses mains, comme il le regarda, comme il admira les cheveux plus clairs et luisants que de l’or fin qui y étaient restés ! La pucelle se mit à rire.

— Demoiselle, par ce que vous aimez le plus, dites-moi pourquoi vous riez !

— Ce peigne est celui de la reine, et les cheveux que vous voyez n’ont certes pas poussé sur un autre pré que sa tête !

— Mais il y a bien des reines et des rois : de laquelle parlez-vous ? reprend Lancelot tout tremblant.

— Par ma foi, de la femme du roi Artus !

À ces mots, Lancelot plie jusqu’à toucher