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LE CRUEL GEANT

hocher la tête, il vous eût fallu grand cœur pour ne pas trembler ! Il se jeta sur le pavillon voisin, trancha, cogna, abattit, piétina tout ; mais les demoiselles s’étaient sauvées, et il n’y trouva personne à occire, de sorte qu’il s’arrêta après avoir tout détruit, comme un lion qui, ayant tué les biches, ne sait plus quoi égorger. Puis il recommença sa chevauchée, assommant comme des chiens tous ceux qu’il rencontrait, jusqu’à ce qu’il aperçût deux jeunes chevaliers qui soupaient sur l’herbe fraîche avec leurs amies, auprès d’un grand feu.

Quand ils virent arriver Mauduit le géant, galopant comme la chasse au diable, ils crurent leur dernière heure venue. Pourtant le cruel descendit, débrida son destrier et se mit à manger, sans mot dire. Mais, lorsqu’il fut rassasié, il se jeta sur ses hôtes, les occit à coups d’épée ainsi que les demoiselles, et se mit à rire du mal qu’il avait fait. Après quoi il se coucha auprès de leurs corps et s’endormit jusqu’au matin.


XXVIII


Cependant Hector avait erré tout le jour. Vers le soir, son cheval recru de fatigue allait au petit pas, tendant le cou, la tête basse ;