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L’ÉCU EFFRAYANT

lui accorder ce qu’elle voulait que de laisser souffrir le petit homme. Il la rappela : elle revint aussitôt, feignant d’être joyeuse ; mais, comme il se penchait vers elle, elle lui dit d’attendre un peu, ce qu’il fit très volontiers.

— Je vois bien que vous ne désirez guère ce baiser, reprit-elle. Eh bien, allez chercher l’écu pendu là-bas, à cet arbre, et je délivrerai mon nain.

Aussitôt dit, aussitôt fait : Hector court s’emparer de l’écu qui était d’argent goutté de sable ; mais, comme il l’emportait, voici sortir dix demoiselles d’un pavillon voisin, pleurant, frappant leurs visages de leurs mains, arrachant leurs cheveux et criant :

— Ha, sire chevalier, vous avez pris l’écu ! Vous nous avez toutes honnies et déshéritées ! Allez à votre malheur !

Or, en revenant au lieu où il avait laissé la vieille et le nain, Hector ne les y trouva plus. En revanche, deux pucelles qui passaient furent si effrayées en voyant l’écu pendu à son cou, que l’une d’elles laissa tomber un petit chien braque qu’elle portait : toutes deux s’enfuirent aussi vite que leurs palefrois purent aller. Un peu plus loin, il rencontra un chevalier suivi de ses écuyers lequel, à peine eut-il aperçu l’écu blanc à gouttes noires, s’empressa de lacer son heaume et de monter sur son destrier.

— Ah ! larron, cria-t-il, vous avez donc dé-