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LE CHÂTEAU AVENTUREUX


XXVI


Vers l’heure de tierce, il arriva dans une forêt épaisse et ancienne qui avait nom la forêt Perdue, et il se vit bientôt au bord d’une clairière où s’élevait un petit château. Au milieu de la prairie, sous quatre pins, se trouvait un trône d’ivoire recouvert d’une soie vermeille, qui portait une lourde couronne de fin or ; et, tout autour, des dames et des chevaliers, les uns armés, les autres en cottes et manteaux, dansaient en se tenant par les mains, de si gaie façon que c’était plaisir de les regarder.

Or, à peine Lancelot eut-il mis le pied dans cette prairie, il sentit son cœur changer, et oubliant tout, sa dame, ses compagnons et lui-même, il ne souhaita plus que de caroler : il descendit de son cheval, laissa tomber sa lance et son écu, courut se joindre à la ronde, tout armé, heaume en tête, et, prenant la main de la première demoiselle qu’il rencontra, le voilà qui chante, frappe ses pieds l’un contre l’autre et s’enjoue plus qu’il n’avait fait de sa vie. Les danseurs chantaient une chanson sur la reine Guenièvre, mais en écossais, de manière qu’on ne comprenait guère leurs paroles, si ce n’est