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LE CHÂTEAU AVENTUREUX

— Il n’est rien, selon mon pouvoir, que je n’accomplisse afin de la sauver, car elle est bonne et sage, et elle a fait plus pour moi que jamais femme pour homme. Mais pour mal qui puisse advenir à mon corps je ne fausserais l’amour que j’ai promis à madame. Et jamais je ne lui mentirai, s’il plaît à Dieu.

— Mais dites-moi : il n’est rien que vous ne fissiez pour garantir de la mort madame la reine ?

— Certes !

— Si vous mourez, que pensez-vous donc qu’il adviendra d’elle ? Elle expirera de douleur. Et, de la sorte, cette pucelle qui seule peut vous guérir, en lui refusant votre amour vous la tuerez, et vous-même, et madame la reine. Et certes l’on pourra bien parler de votre déloyauté, car, à celle qui vous conserva la vie, en récompense vous lui aurez rendu la mort.

Ainsi Lionel semonçait son seigneur par droit et par raison, et Lancelot ne savait que penser.

— Beau doux ami, dit-il les larmes aux yeux, conseillez-moi.

— Le conseil est tout pris : il vous faut faire la volonté de cette demoiselle.

Lancelot ne répondit mot ; il pleurait amèrement, maudissant l’heure et le jour de sa naissance.

— Beau doux ami, dit-il enfin, ni pour mort ni pour vie, je ne ferai rien sans le congé de ma