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LE CHÈVREFEUILLE

Ensemble ils peuvent bien durer ;
Mais, si l’on veut les séparer,
Le coudrier meurt promptement,
Le chèvrefeuille mêmement.
« Belle amie, ainsi est de nous :
Ni vous sans moi, ni moi sans vous ! »
La reine s’en vint chevauchant
Avec une escorte de gens.
Le bâton vit, bien l’aperçut,
Toutes les lettres y connut.
« Je veux descendre et reposer »,
Dit-elle à ses chevaliers.
Du chemin elle s’éloigna ;
Dedans le bois celui trouva
Qu’elle aimait plus que rien vivant.
Ah ! quelle joie ils vont faisant !
Il lui parle tout à loisir ;
Elle lui dit tout son plaisir…
Mais quand il faut se séparer,
Lors, ils commencent de pleurer…

En Galles Tristan s’en ralla :
Son oncle enfin le rappela.
Pour le bonheur qu’il avait eu
Lorsqu’il avait Iseut revu
Et pour les mots remémorer,
Tristan, qui savait bien harper,
Fit un très doux et nouveau lai.
Goatleaf l’appellent les Anglais.
Les Français disent Chèvrefeuille.