Page:Boulenger - Romans de la table ronde II, 1923.djvu/71

Cette page a été validée par deux contributeurs.
61
LE CHÈVREFEUILLE

— Dame, fit une des pucelles, tel fut le mal de monseigneur Tristan et de la reine Iseut. Vous plaît-il d’entendre le lai nouveau qu’on en a fait ?

Et, prenant sa harpe, elle chanta si doucement que toutes se turent pour l’écouter.

 
Le lai qu’on nomme Chèvrefeuille
Assez me plaît pour que je veuille
Vous en conter la vérité,
Comment fut fait, par qui chanté :
De Tristan et d’Iseut la reine,
De leur tendresse et de leur peine,
De leur douleur, de leur amour
Dont ils moururent en un jour.

Le roi Marc était courroucé,
Contre son neveu irrité :
De son royaume il l’exila
Pour la reine Iseut qu’il aima.
En Galles où il était né
Tristan demeure un an entier.
Le désir de la mort le point ;
Ne vous en émerveillez point :
Qui aime bien loyalement
Sans s’amie n’a que tourment.
En Cornouaille il s’en retourne,
Aux lieux où la reine séjourne.
Il ne voulait pas qu’on le vît :
Dedans la forêt il s’est mis.