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LES AMOURS DE LANCELOT DU LAC

savait que le sénéchal était fort aimé du roi, et elle avait grand besoin de son seigneur lige.

— En nom Dieu, s’écria-t-elle, puisque je puis avoir deux champions, vous combattrez tous les deux.

Après manger, le blanc damoisel se leva et vint au mur de la salle où se trouvaient appuyées une quantité de lances. Il en choisit une, la plus grosse et la plus forte qu’il put trouver, en éprouva le fer et le bois, et rogna la hampe de deux grands pieds en présence de tous ceux qui étaient là. Ensuite il alla examiner ses armes avec ses écuyers, regardant bien si rien n’y manquait : ni courroie, ni poignée à son écu, ni maille à son harnois, ni lacet à son heaume. Et tous l’en prisèrent davantage.

Le lendemain, dès que l’aube parut et que le guetteur corna sur le mur, il se leva et la dame le trouva à genoux devant le crucifix ; cela lui plut fort. Pourtant, quand ses deux champions se furent mis en selle, à l’heure dite, dans la lande choisie pour la bataille, et qu’elle vit que le damoisel n’avait pris d’autres armes que l’écu et la lance, elle en fut bien alarmée. Mais il lui déclara qu’il ne pourrait ceindre l’épée qu’après en avoir reçu le commandement de quelqu’un.

— Au moins, souffrez que j’en fasse pendre une à votre arçon, dit-elle. Vous avez affaire à un dangereux homme.

Ainsi fut fait ; puis les quatre champions pri-