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LES AMOURS DE LANCELOT DU LAC

deux valets, préparez à manger en quantité et faites crier par la ville que tous les pauvres et les ménestrels et les faiseurs de tours sont invités à souper.

— Sire, volontiers, mais venez avec nous : nous ne voulons vous laisser seul parmi cette canaille.

Ils sortirent de la salle tous trois sans prendre congé de personne, et, pendant que ses gens achetaient ce qui convenait, le damoisel s’étendit sur son lit. Comme son hôtesse était venue lui tenir compagnie dans ses plus beaux habits, il lui fit donner pour la remercier un surcot et un manteau d’écarlate, fourrés de vair et tout neufs, dont elle fut si ravie qu’elle s’en vêtit aussitôt et appela son mari pour qu’il la vît ainsi faite. Et, quand la nuit fut venue, on alluma tant de luminaire qu’on eût cru que la grange flambait ; puis le damoisel fit asseoir les jongleurs, les danseuses, les bouffons d’un côté de la table et la menue gent de l’autre ; et, vers la fin du repas, les ménestrels commencèrent de chanter, de jouer de leurs violes et les acrobates de faire des tours, en sorte que le bruit et la gaieté se répandirent par la ville. Tous les chevaliers du château vinrent regarder à la porte ; mais le blanc damoisel feignit de ne pas seulement les apercevoir.

La dame de Nohant eut nouvelles de cette fête et, quand elle sut que le champion envoyé