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ADOUBEMENT DE LIONEL

j’eusse rejoint mon seigneur et je fusse mort ou occis avec lui !

Galehaut n’était pas moins chagrin que Lionel : pourtant il le réconforta de son mieux ; après quoi il défendit son ami auprès de la reine, non qu’il trouvât lui-même que Lancelot eût bien fait de partir sans congé, mais parce qu’il voulait lui apaiser sa dame. Cependant, le roi faisait crier par la ville que nul ne s’en allât, car il irait le lendemain délivrer monseigneur Gauvain. Au matin, en effet, il se mit en marche avec ses gens vers la Tour Douloureuse ; toutefois la reine, courroucée, refusa de l’accompagner et fit dire qu’elle était malade.

Or, peu après le départ du roi, elle vit entrer Lionel dans sa chambre, qui lui conta comment Galehaut l’avait arrêté, la veille, parce qu’il n’était pas encore chevalier.

— Dame, dit le demoisel, je vous requiers de me faire chevalier pour l’amour de monseigneur Lancelot.

La reine consentit. Sur-le-champ, elle lui passa son haubert, lui laça son heaume, lui boucla ses éperons et lui ceignit l’épée au flanc ; après quoi elle dit :

— Bel ami, attendons quelque bon chevalier pour vous donner la colée, car il ne convient pas qu’une femme frappe un homme.

— Dame, frappez, je vous prie. Pour l’amour de vous, je ferai mieux de mon épée d’acier.