Page:Boulenger - Romans de la table ronde II, 1923.djvu/194

Cette page a été validée par deux contributeurs.
184
GALEHAUT SIRE DES ÎLES LOINTAINES

on l’appelait Pétroine, et c’est lui qui mit les prophéties de Merlin en écrit.

— Sire, le léopard signifie celui qui fit la paix de monseigneur le roi Artus et de vous. Et c’est le fils du roi qui mourut de deuil et de la reine aux grandes douleurs.

Le quatrième clerc, qui était de Cologne la bonne cité, prononça à son tour :

— Sire, maître Pétroine a bien dit ; mais j’ai vu quelque chose de plus. J’ai trouvé qu’il vous faudra franchir une rivière grande et profonde sur un pont de quarante-cinq planches, et que vous tomberez à l’eau, et que vous irez au fond sans revenir. Quarante-cinq, c’est le terme de votre vie ; mais je ne puis vous dire si chaque planche signifie un an, un mois, une semaine ou un jour.

À entendre cela, Lancelot eut grand deuil et Galehaut sentit l’angoisse en son cœur. Alors maître Hélie de Toulouse le requit de faire sortir le chevalier son ami et les clercs.

— Sire, dit-il, vous êtes un des plus sages princes de ce monde ; mais gardez toujours de rien prononcer devant celui ou celle que vous aimez, qui puisse mettre son cœur en malaise. Je vous dis cela pour ce chevalier qui d’ici s’en est allé, car je sais bien que vous l’aimez du plus haut amour qui se puisse entre deux compagnons loyaux. Et le léopard de votre songe, c’est lui.