Page:Boulenger - Romans de la table ronde II, 1923.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.
161
LANCELOT FORCENÉ


XX


Lancelot, cependant, menait si grand deuil dans sa prison qu’on ne pouvait le décider à boire ni à manger : alors sa tête se vida, puis s’emplit de rage et de frénésie, et il se mit à battre et blesser ses compagnons, de sorte qu’on dut l’enfermer seul dans un autre cachot. Vainement Galehaut implora le geôlier, disant qu’il aimait cent fois mieux d’être tué par son ami que d’en être séparé ; l’homme, qui était mauvais, ne voulut point les réunir. Toutefois, il fut apprendre à la dame de la Roche qu’un des prisonniers était devenu fou. Elle ne connaissait que monseigneur Gauvain.

— Quel est-il ? demanda-t-elle.

— Dame, c’est un pauvre homme, sans doute ; ses compagnons assurent qu’il ne possède pas seulement un pouce de terre.

— Ce serait donc péché mortel que de ne pas le relâcher.

Et, à l’aube, le forcené fut mené hors du château par une fausse poterne. C’est ainsi qu’il se rua soudain au milieu de l’armée où il se mit à faire un furieux dégât. Il n’avait point d’arme, mais il renversait les tentes, attaquait les dor-