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GALEHAUT SIRE DES ÎLES LOINTAINES

croisade qu’il avait apprise en son enfance. Et sachez qu’il chantait bien et plaisamment, en sorte que la pucelle l’écoutait sans mot dire et que ses compagnons, qui allaient devant, ralentirent leur allure.

 
Le temps nouveau, le mai, la violette,
Les rossignols m’invitent à chanter,
Et mon fin cœur me fait d’une amourette
Le doux présent que n’ose refuser.
Ah ! Dieu me laisse à tel honneur monter
Que celle où j’ai mon cœur et mon penser
Je tienne un jour entre mes bras, nuette,
Avant que j’aille outre-mer !

— Je ne sais pas un chevalier à la cour du roi mon oncle, qui soit aussi agréable que Sagremor, dit messire Gauvain.

— Non, fit messire Yvain, ni qui soit plus preux et entreprenant.

— Attendons-les, et nous chanterons avec eux.

— Ha ! ils ont bien plus de plaisir entre eux deux qu’en notre compagnie ! s’écria Giflet.

Comme il disait ces mots, la demoiselle se prit à chanter à son tour, et il n’y avait femme en tout le pays de Logres qui si bien le fit, de manière que les compagnons l’écoutèrent volontiers, oubliant leurs gais propos et leurs rires.