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I


Le roi Artus séjournait tour à tour dans ses bonnes villes, menant sage vie entre la reine et la dame de Malehaut, qui étaient toujours ensemble (car amour les tenait liées de court), honorant ses chevaliers, donnant tout ce qu’il pouvait et bien accompagné de barons, de valets, d’écuyers et de sergents qui conduisaient ses sommiers chargés de riches draps, de robes, d’armes, d’écuelles, de hanaps, de cuillers, de pots d’argent et de tout ce qui convient à des prud’hommes. Il faisait beau temps et l’été était bon et doux, car il avait plu longuement ; sur toute la terre le soleil resplendissait, et la rose fleurissait, le loriot chantait avec le merle et la pie, toute chose vivante avait recouvré beauté, force et vertu, si bien que chacun en avait le cœur gai. Au matin, les chevaliers et les dames se paraient de robes parfumées en satin, drap d’outremer ou soie brochée, puis ils allaient s’enjouer au bois : alors on décousait les grandes manches flottantes que les pucelles savaient bien recoudre, pour le retour, avec le fil qu’elles emportaient dans leurs aumônières ; on se baignait aux fontaines les mains,