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LES AMOURS DE LANCELOT DU LAC

était aussi lisse que le cristal, ses lèvres vermeilles comme la rose et un peu charnues pour bien baiser, ses dents claires, riantes, faites au compas ; bref elle avait l’air d’un ange descendu de la nue. Mais autant elle était belle, autant elle était sage, bien parlante, courtoise, débonnaire et vaillante, de manière qu’on ne pouvait la voir sans l’aimer.

Quatre jours s’écoulèrent, durant lesquels elle ne cessa de prier Galehaut de hâter l’entrevue : car elle soupçonnait bien que le noir chevalier n’était pas aussi loin qu’on disait. Enfin, le cinquième, comme elle lui demandait quelles étaient les nouvelles :

— Assez belles, dame, fit-il ; la fleur des chevaliers est arrivée.

— Ha ! comment faire pour le voir en secret ?… C’est que je ne veux point que d’autres le voient avant moi.

— En nom Dieu, c’est aussi ce qu’il ne veut ! Mais voici ce que nous ferons.

Il lui montra un coin de la prairie tout couvert d’arbrisseaux, et il lui recommanda de venir là au crépuscule, aussi peu accompagnée que possible.

— Beau doux ami, comme vous parlez bien ! Plût au Sauveur du monde qu’il fit nuit sur-le-champ !

Toute la journée, elle devisa pour tromper le temps. Enfin, le soir venu, elle prit la main de