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L’AFFAIRE SHAKESPEARE.

tif, que sais-je ? — bref, quand il aurait tous les défauts que M. Beaunier lui reproche, la thèse qui s’y trouve exposée n’en pourrait pas moins être juste, et en somme c’est là le seul point intéressant.

Ainsi, je veux bien que M. Lefranc, qui a mis des « peut-être » et des « probablement » dans son exposé partout où il en fallait honnêtement mettre, ait donné une forme trop catégorique à ses conclusions ; mais qu’est-ce que cela fait, en somme ? La vérité historique n’est jamais qu’une forte probabilité, et ce qu’on appelle résoudre un problème du passé, c’est seulement mettre de son côté le maximum de chances de vérité. Si M. Lefranc eût conclu que Stanley est très vraisemblablement et que Shakespeare n’est très vraisemblablement pas l’auteur de Roméo et Juliette, des Joyeuses commères de Windsor, d’Hamlet, de la Tempête, est-ce que cela ferait au fond une grande différence ?

Il paraît que oui, puisque M. Beaunier reproche si rudement à son adversaire d’avoir négligé les précautions oratoires. Ah ! comme il est sévère, cet André Beaunier !… Mais venons à sa discussion.



Selon les adversaires de Shakespeare, celui-ci n’a pu écrire son œuvre parce qu’il était (c’est M. André Beaunier qui parle) « un ignorant, un homme grossier, fils d’un boucher, boucher lui-même et puis valet d’acteurs ». On répondrait à M. Lefranc (continue le critique) : « Non, ce Shakespeare n’était pas si