Page:Boulenger - L'affaire Shakespeare, 1919.djvu/50

Cette page a été validée par deux contributeurs.
44
l’affaire shakespeare.

au courant de l’affaire Shakespeare. Tel est l’inconvénient des articles de journaux.

Ils en ont un autre : c’est de mécontenter M. André Beaunier[1]. M. André Beaunier désapprouve qu’un professeur au Collège de France annonce ses découvertes dans le Petit Parisien. Il estime qu’en agissant ainsi, M. Abel Lefranc ne s’est pas comporté comme font le plus souvent les érudits, «  gens discrets, secrets, et qui trouvent de jolies choses peu importantes ». Mais on peut se demander si à l’ordinaire cette discrétion des érudits n’est pas, pour ainsi dire, involontaire : je crains qu’il n’en soit peu, en effet, qui aient jamais eu l’occasion d’écarter pudiquement les sollicitations d’un grand journal. Et puis il peut arriver que des érudits découvrent des choses qui ne soient pas peu importantes. Enfin, quand même elles le seraient, il ne serait pas désagréable de voir les grands journaux s’en occuper : il me semble que si l’on arrivait à captiver les lecteurs du Petit Parisien par des controverses d’histoire littéraire, cela ne pourrait que profiter aux bonnes lettres et à la paix civile. Ah ! plaise aux dieux que les gazettes à fort tirage parviennent à intéresser leurs lecteurs à ces pacifiques querelles !… En somme, je serais bien plutôt porté à féliciter M. Abel Lefranc d’avoir réussi à insérer aux premières colonnes du Petit Parisien un article sur l’affaire Shakespeare qu’à l’en blâmer avec M. André Beaunier.

  1. Voir la Revue des Deux Mondes du 1er février 1919.