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L’AFFAIRE SHAKESPEARE.

en douteraient n’auraient qu’à ouvrir leur Shakespeare : ils y trouveraient l’extrait de Monstrelet et s’en assureraient aisément.

Pourtant il s’agit là d’une série de faits bien connus et contemporains de la pièce shakespearienne. C’est une histoire fort compliquée. L’Aquitaine ou Guyenne était gouvernée en partie par Henri de Navarre, en partie par son beau-frère, le roi de France, et cela causait des querelles et des troubles sans fin que les guerres de religion n’apaisèrent point. La dot de Marguerite de Valois, qui ne fut jamais payée, était garantie en partie par certaines villes de Guyenne, — le « douaire de la Reine », dont parle Boyet dans la comédie. Pour résoudre ces conflits, Catherine de Médicis se mit en route pour la Navarre en compagnie de Marguerite qui était alors avec elle à la cour de France et que Henri avait mandée. Les deux reines étaient accompagnées de leurs dames et de leurs filles, l’ « escadron volant », comme on l’appela, sur les grâces desquelles la rusée Catherine comptait. « Elle avait résolu, dit un historien, de livrer au roi de Navarre une vraie bataille de diplomatie et de galanterie… Ne prétendait-elle pas que les lenteurs des négociations n’avaient pour cause que le désir de voir plus longtemps ses filles ? » Si celles-ci étaient semblables aux Rosaline, Catherine, Maria de Peines d’amour perdues, on conçoit en effet cette lenteur des négociations. Marguerite et son mari demeurèrent à Nérac dont le parc vit alors des fêtes incessantes : « Les festins, les danses, les mascarades, les heures joyeuses, comme parle Biron dans la comédie, précé-