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légende de la grotte du diable

autre, sans se soucier de l’abîme qu’ils franchissent ? Leurs pieds agiles posent sur une arête qui est une véritable aiguille, et par un nouveau saut, ils rebondissent sur un petit sentier où nul chasseur ne saurait les atteindre… Elle se promenait donc absorbée dans les réflexions, cheminant dans le sentier étroit.

Soudain un choc terrible fut sur le point de la renverser. Surprise, elle regarda et qu’aperçoit-elle ? un vilain, très vilain Diable… Celui-ci levé matin allait, bien sûr, accomplir quelque méfait… Ils sont capables de tout, ces malins, à part d’une bonne action, et je sais parmi le monde, plus d’un à figure humaine dont on pourrait dire autant.

Ce diable malin était d’un ordre inférieur, par conséquent il devait à la fée, respect et obéissance… mais vous savez fort bien que ces malins n’aiment pas à se soumettre. C’est toujours comme cela… Surprise, Madame, la bonne fée se contente de dire : « Le sentier est étroit, retire-toi de ma route, tu me gênes…

La bonne fée dit ces paroles sans la moindre colère, mais d’une voix ferme en bon breton du pays de Cornouaille. Ce n’est pas étonnant, car ce langage est le plus ancien de tous ; même on le parle au paradis… Mais notre diable était têtu, et d’autant plus têtu qu’il était de Crozon, ce qui n’est pas peu dire.

C’est passé en proverbe, et ceux qui possèdent plusieurs bons amis dans ce coin de terre le savent bien… Ils les ont entendu dire, et même ils s’en aperçoivent bien sans cela…

Ne les entendons pas s’exprimer ainsi : « Nous sommes d’abord têtus parce que nous sommes bretons et nous sommes de plus de Crozon parce que nous sommes têtus, oui, Nous sommes têtus parce que nous sommes de Crozon, c’est dans notre sang.