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audierne

vase, terrain d’alluvions amoncelées depuis des siècles ?… Des bois témoins de cette époque, résistants encore, malgré leur vétusté et leur séjour prolongé à une profondeur de deux mètres… on n’ignore pas du reste, comment ce milieu impénétrable à l’air, conserve les bois de constructions, et c’est encore ainsi que l’on conserve les bois de la marine.

Le niveau a donc bien baissé depuis des siècles. Dans le Raz de Sein, j’ai parlé de l’affaissement progressif du littoral à différents endroits de nos côtes, et assurément il est remarquable ici… il n’est pas nécessaire d’avoir le demi-siècle pour en avoir fait la remarque, pour avoir vu des navires de fort tonnage remonter la rivière… Celle-ci s’ensable tous les jours ; quelques navires légers, s’aventurent encore, mais moins fréquents.

Le char du progrès, le chemin de fer, vient au mieux réparer le dommage fait.

Une pente douce, d’environ trois kilomètres longeant la rivière mène à Audierne… En petit, il rappelle le chemin de la Corniche, à sa partie basse… mais là, ce sont des palmiers, des citronniers, des orangers, dont l’ombre va se mirer dans la Méditerranée… Ici, ce sont des landes, des bruyères, du genêt qui font couronne ; mais qu’importe ? une mère est toujours belle pour ses fils, même la plus belle… et la Bretagne est notre mère.

Vantez donc à l’Irlandais, le beau soleil de France et d’Italie. Que lui importe les fruits d’or et les roses vermeilles, une brise plus douce, un oiseau plus léger… tout cela ne vaut pas la toute verte Eryn… et nous mêmes à quoi donnerons-nous la préférence ? La verte Normandie, la belle Bretagne offrent des sites plus gais, plus agrestes que ce midi de la France, où le soleil brûle tout.