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la croix de pennéarc’h

Tout le monde est d’accord, os loquitur ex abundantiâ cordis ! et c’est encore plus exact pour le pinceau et le burin.

Il n’existe pas, en effet, un cœur assez pur, assez élevé pour traduire, un pareil sujet, pas plus qu’on ne le peut dans le style, dès lors qu’on ne saurait le comprendre.

C’était là, le résumé des réflexions qui hantaient mon esprit au pied de cette pauvre croix de pierre, dont l’origine est inconnue.

Un souvenir me vint, en pensant à Michel Ange, le grand artiste avait peint, dans un de ses tableaux, une vierge mère… et nous le savons tous[1], une seule personne, une seule, et encore !! pouvait prendre le droit, de faire des remarques sur les travaux, qu’il lui commandait, c’était le grand pontife qui alors régnait sur le siège de Pierre, celui auquel l’art doit ses plus beaux monuments et ses plus beaux tableaux… un grand seigneur, qui avait ses entrées à la cour pontificale, fut introduit dans les ateliers de Michel Ange, il examina en connaisseur le beau tableau que l’on prépare, le critique, a l’audace de dire que la vierge a les traits de la jeunesse, qu’elle a l’air trop jeune… le grand artiste impatient : ne sais-tu pas, Fauchino, que les vraies vierges, restent toujours jeunes, peuvent-elles avoir des rides ?

Le grand artiste ne comprenait pas qu’une vierge pût prendre un semblant de vieillesse.

Il en est de même pour quiconque veut en connaisseur, juger une tête de Christ mourant.

Partout et toujours on exagère la douleur jusqu’à l’horreur même, il y en a qu’on devrait

  1. Michel Ange ne supportait pas la critique… Il se vengea d’un cardinal aristarque de cette façon : il prit son portrait, et dans un de ses tableaux, il le plaça… dans les flammes de l’enfer.