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la fontenelle

Sans attendre, Kervel ajouta… Ce chef sera moi, si vous le voulez… Il paraît que le marin n’était pas aimé, car un murmure significatif fut la réponse… C’était un refus. Ah dit un gaillard déterminé… Qui es-tu, Jérome Kervel, pour nous commander, nous voulons bien marcher mais pas sous tes ordres… Tu connais ta baie, tu connais tes côtes, tes salaisons… tu portes un poignard, tu as une arquebuse, et après ? Qui de nous n’en a pas ? Tu n’auras pas ma voix.

Vraiment, Michel Tanguy, crie le pêcheur : Pour toi, tu ne comptes pour rien ici… Le premier, tu devrais faire silence (peoc’h, peoc’h) toi, ton père était huguenot, et ta mère ne t’a fait catholique que pour vivre de l’église par la ligue… Il fallut séparer les deux ligueurs jaloux, car ennemis depuis longtemps ils allaient en venir aux mains… L’assemblée surexcitée cria de nouveau… un chef, un maître auquel nous obéirons tous.

Le jeune homme à plumet rouge, resté jusque-là impassible lève la tête, et tirant son épée du fourreau, repoussa un des assistants, et se mettant au milieu du cercle : Ce sera moi, votre chef compagnons.

À la surprise que causa cette exclamation, tous le regardèrent étonnés… néanmoins un peu d’admiration se manifesta. L’air audacieux et ferme de Guy Eder parlait en sa faveur. Kervel ambitieux déçu, ricana… Jeune page, qui es-tu ? Tu ne portes les couleurs, ni de France ni de Bretagne, peut-être, es-tu pour les espagnols, et don Diego Brochers est-il débarqué au Blavet ? T’envoie-t-il prévenir Nicolas Aradon, gouverneur de Vannes, qu’il est temps d’aller reprendre Hennebont ? allons, parle donc… veux-tu nous enrôler sous les bannières espagnoles ?