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de la fausse conscience

bien. Ce guide naturel est-il cependant toujours bien sûr ? Que de fois il se tait, ou se fait à peine entendre, quand il devrait parler le plus haut ! Que de fois le chemin qu’il a montré, ou qu’il a semblé montrer, n’était pas le droit chemin ! Que de fois enfin ses indications ont reçu des interprétations diverses ou même contradictoires ! On dit que le remords accompagne ceux qui méconnaissent cette voix intérieure ; mais bien des grands coupables ne dorment-ils pas tranquilles avec la conscience en paix ? Combien d’ailleurs qui, pour se justifier eux-mêmes à leurs propres yeux, faussent et dénaturent ce sens moral, sans parler de ceux qui, l’ayant étouffé, font désormais le mal sans nul scrupule et en pleine connaissance de cause ? Infiniment plus nombreux sont ceux qui, au lieu de le braver de front, cherchent à ruser et à biaiser avec ce juge importun, et qui se forgent une conscience particulière, artificielle, au service de leurs intérêts et de leurs passions. Indélicats, malhonnêtes, à force de faux raisonnements, ils finissent par se persuader plus ou moins qu’ils avaient le droit de faire ce